Chargée de projet informatique dans une banque mutualiste à la ville, Claire Ferré, 32 ans, est aussi sauveteuse en mer bénévole. Le 1er mars, la Camarétoise est même entrée dans le cercle très
fermé des présidentes de stations SNSM. Elles ne sont que onze en France à occuper ce poste. Les murs des chambres d'enfants sont souvent le reflet de leurs rêves.
Quand certains de ses camarades de classe s'imaginaient footballeur professionnel, danseuse étoile, vétérinaire, pompier ou spationaute, Claire Ferré, elle, collait des posters de bateaux de la
SNSM (société nationale de sauvetage en mer) dans chaque recoin de la pièce.
« Autant que je m'en souvienne, j'ai toujours voulu devenir sauveteuse en mer. Je conservais tous les articles de presse et je demandais à mes amis de me rapporter des porte-clés ou des
calendriers SNSM du coin où ils partaient en vacances. C'est une passion qui remonte à loin et que je ne m'explique pas », rigole cette femme de 32 ans originaire de Sarzeau (56). Et de se
remémorer ses très nombreuses visites à la station voisine de Port-Navalo. « Enfant, j'y allais dès que je pouvais. Ça me faisait rêver. Qu'est-ce que j'ai dû casser les pieds des sauveteurs!»,
souffle celle qui a navigué, dès sa prime jeunesse, sur tous types de supports, de l'Optimist à la voile habitable en passant par la planche à voile. « Mais dans la famille, personne n'avait
jamais intégré la SNSM. Je suis la première ».
« Ne pas être la femme de... »
Reste que cette activité est bénévole. « Il a donc fallu que je me forme à un métier. Mais sans jamais perdre de vue cet objectif de devenir sauveteuse en mer », confie Claire Ferré, qui intègre
rapidement le service informatique d'une banque de la région brestoise à l'issue de ses études. Comme aimantée par la mer, elle postule aussi sec à la station SNSM de l'Aber Wrac'h. « C'est là
que tout a commencé en 2013. J'ai travaillé pendant deux ans en tant que canotier, le poste de base, sur le pont. J'étais la seule femme à bord et ça ne m'a jamais posé le moindre problème », se
souvient-elle.
C'est là aussi qu'elle rencontre son compagnon, lui-même canotier, mais à Camaret. Ils partagent la même passion, comprennent les contraintes liées aux astreintes et aux départs en intervention à
toute heure du jour et de la nuit. « En 2015, nous avons choisi de nous installer tous les deux à Camaret. C'était plus simple. Je me suis adaptée à une nouvelle structure, une nouvelle
organisation. Surtout, j'ai tout de suite voulu retrouver une place à bord. Mais je ne voulais pas être considérée comme la femme de... ». Parfaitement intégrée, elle fait de nouveau ses preuves
et poursuit son bonhomme de chemin. Jusqu'à prendre, il y a un mois, la tête de la station et de son équipe de 28 personnes embarquées et une dizaine d'autres à terre. Une exception dans un monde
très (trop) masculin. Sur les 220 stations que compte la métropole et l'outre-Mer, seules onze sont présidées par une femme (*).
« Une deuxième famille »
Une femme, donc. Jeune, qui plus est. Et pas originaire de la Presqu'île de Crozon... Ne le cachons pas, cette nomination a beaucoup fait causer à Camaret. Et au-delà. « Certes, ce n'est pas
anodin. Cela dit, je suis encore étonnée par toute l'effervescence que ça suscite. Car le passage de relais avec l'ancien président, Jacques Bruère, s'est fait naturellement. Je m'intéressais
depuis longtemps à la gestion de la station, je me suis renseignée et j'ai postulé, voilà tout. Je suis fière de mon équipe, fière de sa dynamique. Bien plus que d'être une femme à la tête d'une
station SNSM. Je ne le porte pas comme un étendard », explique-t-elle d'un ton assuré.
Aussi assuré que lorsqu'elle précise qu'elle n'a pas l'intention de devenir une simple administratrice. Titulaire des permis côtier et hauturier, ainsi que du diplôme de secouriste, Claire Ferré
entend bien continuer à embarquer sur le Notre-Dame-de-Rocamadour, la vedette SNS097 de la station camarétoise, commandée par Stéphane Belbéoc'h. Car ce qui la fait vibrer, c'est indéniablement
l'action, venir en aide aux gens en détresse. « Sauver et rentrer », comme il est écrit sur le tableau de service de la station. Le tout en conservant un esprit de groupe au sein de sa « deuxième
famille ». Sans quoi, elle ne donnerait pas autant de son temps.
« Je fonctionne à l'envie »
« Depuis février, je consacre jusqu'à quatre heures par jour à la SNSM, sans compter les interventions. Je pars tôt au travail pour pouvoir me dégager du temps le soir. C'est
très prenant, mais je suis très bien entourée et nous sommes soudés. Je ne vois donc pas ça comme une contrainte », insiste Claire Ferré. D'autant qu'une fois l'organisation des 150 ans de
la station finalisée (cet été), son investissement ira sans doute décroissant. « Je suis partie pour un bail de six ans. Mais je n'ai pas de plan de carrière. Je fonctionne à l'envie, sur le mode
collectif ; la station ne repose pas que sur moi. Je n'ai aucun problème à déléguer à plus compétent. Tant que le travail est fait, ça me va ». Et tant qu'elle aura du plaisir et de l'énergie,
Claire Ferré acceptera d'appareiller au moindre coup de fil de Jean-Paul Melenec, patron du bar La Chaloupe et « véritable coordinateur de la station ». Sous 15 minutes. Par tous les
temps. Sans stress. Juste avec l'envie de bien faire.
* Dont quatre en Bretagne : Claire Ferré à Camaret (29), Béatrice Le Marrec à Primel-Plougasnou (29), Annette Pruvot à Trébeurden-Île Grande (22) et Marine Kuhn à
Saint-Brévin-les-Pins (44).
Un article de la rédaction du Télégramme